On pourrait dire qu’actuellement, chercher des résidence pour personnes âgées au bon prix, c’est comme chercher de l’eau dans le désert. Il se peut bien sûr que vous en trouviez, mais il arrive aussi, dans le désert, qu’un espace d’eau que vous voyez à l’horizon soit simplement le reflet du soleil sur le sable… Et, comme le reflet avance avec vous, vous pouvez marcher longtemps avant de vous en apercevoir…
Des mirages de ce genre sont fréquents dans le milieu de l’habitation pour aînés. Et l’acheteur qui en est victime retombe dans la réalité lorsque le banquier lui fait comprendre qu’il a été victime d’un mirage… ou lorsque, en vérification diligente, il s’aperçoit après coup que la rentabilité de sa nouvelle résidence n’est pas ce qui était supposé!
C’est ce qui est arrivé tout récemment à un acheteur: il n’avait pas bien analysé les chiffres et c’est le banquier qui lui a fait comprendre que la RPA qu’il convoitait n’était pas assez rentable… Les salaires avaient été volontairement diminués par le vendeur, réduisant ainsi artificiellement le total des dépenses. Du reste, il ne faut pas se surprendre de l’intervention des banquiers : ceux-ci, depuis les 2 dernières années, préviennent les coups et portent le chapeau de conseillers avant celui de prêteurs.
De tels mirages peuvent aussi se produire lors des reprises de finances. Comme un appel d’offre vise précisément à faire grimper les enchères, il arrive quelques fois que des acheteurs, enivrés par l’exercice, offrent un prix top élevé et finissent par se désister…
Il y a évidemment rien de mal à chercher à recevoir le maximum pour une résidence à vendre. Le problème vient lorsque la rentabilité ne justifie pas le prix demandé. On est alors en face d’un mirage. Voici quelques conseils pour vous permettre d’avoir l’esprit solidement ancré dans la réalité du marché.
Quelques questions à poser
Même la notion de revenu net peut être un mirage s’il n’est pas interprété correctement. En effet, le cash flow dont vous parle le vendeur ne correspond pas au revenu net calculé par le prêteur (ou de la valeur économique), qui, lui, tient compte d’un grand nombre de dépenses qui ne sont pas considérées dans le cash flow. Il est donc nécessaire d’évaluer le revenu net que vous donne le vendeur. J’en ai parlé avec plus de détails dans un précédent article : le cash flow et le revenu net, ce n’est pas la même chose ! (1).
On peut aussi questionner le vendeur à savoir s’il travaille ou non dans sa résidence. S’il vous dit non, assurez-vous que c’est bien le cas, sinon vous serez obligé, une fois devenu propriétaire, de compenser le manque qui correspond aux heures passées par l’ancien propriétaire en engageant du personnel supplémentaire. En général, cela représente entre 40 000$ et 70 000$ de plus par année…
Car c’est le point de vue du prêteur qu’il faut prioriser, et c’est à partir de ses exigences qu’il faut établir la valeur réelle d’une résidence pour personnes âgées, soit une valeur qui corresponde à la réalité du marché et non à un « mirage ». Et d’ailleurs, si les chiffres ou les paroles peuvent être de la poudre aux yeux, il faut aussi se méfier des rapports d’évaluation qui, eux-aussi, peuvent comporter une part d’irréalité par des comparables vendus depuis trop longtemps ou non pertinents, et sur lesquels sont appliqués des taux de capitalisation trop bas.
L’art de lire un rapport d’évaluation
En effet, il ne faut pas avoir peur de questionner les rapports d’évaluation qu’on vous présente. Certaines questions de base devraient guider votre démarche d’analyse. Par exemple, vous devez vous demander si le taux de capitalisation calculé par l’évaluateur correspond à ceux en vigueur. S’il est trop bas, il se peut que la résidence convoitée soit un « mirage », puisque le prêteur reverra l’évaluation de la résidence pour aînés à la baisse avec son propre taux.
Une autre question à se poser concerne les comparables : est-ce que les comparables présentés dans le rapport d’évaluation sont réellement comparables avec la résidence évaluée? Il arrive très souvent que ce ne soit pas le cas, pour plusieurs raisons. On peut par exemple évaluer une résidence pour personnes âgées qui ne soit pas du même âge que la résidence à vendre, ou qui présente certaines caractéristiques qui ne sont pas toujours prises en compte. Par exemple, si les chambres de la résidence à vendre ne possèdent pas de toilette et lavabo, peut-on logiquement prendre pour comparable une autre qui en possède? Et que dire des résidences que l’on retrouve dans certains rapports d’évaluation, qui ont été vendues depuis trop longtemps pour être logiquement considérés en tant que comparables ? On pourrait poser d’autres questions telles que celle de savoir si le personnel est syndiqué ou non, ce qui influera forcément sur le prix de vente, ou d’autres encore plus « techniques » mais néanmoins essentielles : gicleurs, largeur des portes, présence ou non de sanitaires, dimension des unités…
Et, enfin, est-ce que le vendeur consent à accorder une balance de vente ? Cette question est essentielle car elle détermine le succès ou l’échec de la transaction. Bien plus, je dirais qu’il s’agit d’une condition obligatoire à sa réalisation. Pourquoi ? Parce que depuis 2009, les prêts accordés ont diminué de presque du tiers par rapport à ce qu’ils étaient avant la crise. La balance de vente est donc l’occasion de combler le manque et de permettre la conclusion de la transaction. Je parlerai d’ailleurs de la balance de vente dans un prochain numéro du BRP…
Vous pourriez me demander quel sont les conséquences d’être victime d’un mirage ? Dans le meilleur des cas, vous ne ferez que passer votre temps à passer d’un mirage l’autre. Mais dans le pire des cas, si vous offrez une mise de fonds importante, le prêteur pourra peut-être vous accorder votre prêt. Mais dans ce cas, vous prendrez conscience que vous avez payé trop cher pour les revenus de votre nouvelle résidence, par exemple, si vous avez mal évalué le nombre d’employés qui doivent être en place pour permettre à la RPA de fonctionner. Et alors votre mirage deviendra très lourd et vous devrez le porter comme un boulet. Ou tout simplement, vous pourrez vous apercevoir qu’avec votre mise de fonds, vous auriez pu vous acheter une résidence plus grosse ou plus luxueuse…
Et elle ne sera plus revendable à court ou moyen terme.
Ainsi, pour éviter les mirages, il suffit de poser les bonnes questions…
REFERENCES
(1) Voir BRP 72.
http://www.richardperreault.ca/brp/72Web.html
RÉSIDENCES POUR PERSONNES ÂGÉES À VENDRE – CLIQUER ICI
rpBRP 74.1